Supercherie

Se développer économiquement. Réformer la gouvernance. Se faire une place dans le monde contemporain. Accéder à la modernité. Quels beaux slogans! Ceux qui les proclament y croient-ils vraiment, sincèrement?

Vous appelez au téléphone: l’interlocuteur ne dit plus allo, c’est un mot impie. Il faut dire Assaloum Alykoum: c’est plus conforme à notre identité. Vous voulez faire partie de la société, il faut avoir un tapis de prière bien visible dans son bureau ou sur le siège arrière de votre voiture. Laquelle voiture doit arborer sur sa vitre arrière quelques versets du coran, ou encore un autocollant remerciant le créateur. Vous êtes jeune femme et vous voulez vous protéger contre les agresseurs: vous devez couvrir votre tête et plus si non claustrophobe.

Et les exemples et images sont nombreux qui décrivent une société d’hypocrisie, de religiosité superficielle, de blocage, de crainte, d’inhibition…

Le développement ne se fait pas sans transformation des mentalités, sans émancipation des individus. Il ne s’est jamais obtenu sans heurts, sans confrontations plus ou moins violentes. On ne fait pas d’omelette sans casser d’oeufs. Demander encore plus de libertés, revendiquer les amendements constitutionnels, prôner l’alliage authenticité et modernité, resteront des voeux pieux dans le meilleur des cas. Autrement, c’est de la supercherie commercialisée par ceux qui cherchent des places au soleil aux dépens ou en manipulant la population, qui est ailleurs, qui ploie sous le poids des besoins quotidiens, des traditions et des craintes.

Ceux qui comprennent les besoins, nécessités et moyens du changement profond n’ont pas de problème avec la situation actuelle. Ils s’y adaptent en vivant dans des bulles, ils ne nourrissent pas d’ambition collective: le combat est trop exigent pour des résultats non assurés. Les femmes, les jeunes, matrice et moteurs des transformations, acceptent leur sort, se résignent, se réfugient dans l’irrationnel, sombrent dans la dépression ou les stupéfiants, ou cherchent à fuir.

Les régimes arabes et leurs alliés savent tout cela. Ils n’ont aucune raison de provoquer la transformation. Ce n’est pas leur job! Ils se maintiennent, ils parient sur le temps, sur les vertus de l’enrichissement individuel…