Sur l’autoroute Casablanca Rabat, un gros poids lourd s’est renversé sur la chaussée répandant toute sa cargaison sur la surface entourant son point de chute. Des dizaines de tonnes de blé. Cette matière première tant recherchée et appréciée par les marocains, devenue si chère et si encombrante pour notre caisse de compensation et pour nos finances publiques.
Quelques temps plus tard, la nouvelle s’est répandue faisant converger vers le lieu de l’accident des troupes de femmes et hommes, jeunes et moins jeunes, sortis de nulle part, se ruant sur les grains de blé gratuit offert par la compagnie de transport qui n’a pas suffisamment pris soin de son camion ou n’a pas bien choisi son chauffeur… Il fallait voir les récupérateurs déguerpir les uns après les autres, leur sac sur le dos, tels des fourmis portant leur minuscule butin dans leur discipline légendaire…
Depuis la route Agadir Marrakech, on peut voir le village du chantier de l’autoroute en construction. Le tronçon le plus compliqué à réaliser, comprenant même un tunnel. En réponse à l’appel d’offres lancé par le gouvernement marocain, une société chinoise a été choisie pour avoir présenté l’offre la moins chère. Je n’ai pas vu les termes du marché, mais les clauses ne devaient pas prévoir de privilège pour les sociétés marocaines, ni d’obligation pour les sociétés étrangères d’embaucher de la main d’œuvre locale. Du coup, un village immense peuplé de chinois s’est établi en plein territoire montagneux du Maroc, destiné à fonctionner sans doute en autarcie pendant plusieurs mois. Plusieurs interrogations viennent alors à l’esprit : s’agit-il de forçats comme certains le prétendent ? la main d’œuvre locale ne pouvait-elle pas aussi profiter de ces grands travaux d’une manière ou d’une autre ? quelles retombées aura l’implantation de cette armada chinoise sur cette région ?
Sur l’autoroute Casa Marrakech, en plein mois d’août, sous une chaleur torride à plus de 42° C, dans l’endroit le plus désert du parcours, deux gendarmes appuyés sur leurs grosses motos dégustent chacun une glace… Difficile de croire que les motos sont équipées de freezers fonctionnant à l’énergie solaire. Et pourtant c’est la plus plausible des explications puisque aucun magasin n’est en vue. La plus plausible jusqu’à ce que, quelques kilomètres plus loin, notre voiture dépasse un gros camion congélateur. Et tout se clarifie lorsque l’on voit sur ces parois externes de la publicité pour des cornets de glace bien alléchants en cette période de l’année…