14 mars 1998, jour de présentation du gouvernement d’alternance de Abderrahman Youssoufi, jour censé être historique dans la vie du Maroc. Et pourtant le jour du dixième anniversaire n’a pas été célébré, ni même rappelé. La presse, que je sache, n’en a pas parlé. Nos observateurs et politiques n’ont rien écrit à l’occasion. Pas d’analyse, pas de rétrospective. Pas de séminaire d’étude, pas de cérémonie officielle. Les protagonistes du premier plan ne sont plus là, ou ont abandonné la vie active, pour se rappeler à notre souvenir, pour évoquer la journée qui a scellé la réconciliation nationale entre partenaires politiques jusque là suspicieux les uns envers les autres…
Que s’est-il vraiment passé pendant ces dix années? Les promesses d’un évènement, que Feu Hassan II et les partis de la Koutla avaient voulu marquant, ont-elles été tenues? Quels résultats? Quel bilan?
Que l’on se rassure, je n’ai aucune intention de répondre à ces questions. Les historiens devront bien le faire un jour.
Mais à première vue, comme ça vient, je peux citer quelques idées qui, pour moi, émergent à la surface de cette vie politique terne et décalée que connaît notre pays. Stabilité du régime politique, renforcement de la monarchie, mais décadence des partis politiques et aucune amélioration du système judiciaire…Progrès notables en matière de libertés, de pouvoir d’achat, d’infrastructures… Mais persistance du sous-développement humain et social…Amélioration de l’attractivité vis-à-vis des investisseurs étrangers mais recul de l’influence diplomatique…
A partir de ce survol rapide, le bilan parait mitigé et l’avenir pas encore assuré, comme cela est illustré par le fort taux d’abstention de septembre 2007.
Si l’on veut on peut aussi faire appel à des chiffres et des dates qui ont marqué ces dix années.
Le 12 mars 2000, les deux marches de Rabat et Casablanca, l’une pour soutenir le plan d’intégration de la femme et l’autre pour le dénoncer. Fracture, donc, et intervention royale pour arracher la Mouddawwana quelques années plus tard.
Le 23 août 2000, le flop de Talsint. Mais vite oublié, les privatisations se sont chargées de renflouer les caisses de l’Etat: les 11 milliards de Dh de Méditel et les 22 milliards de Dh de Vivendi..
Fin mars 2001, le sixième congrès de l’USFP, la scission et le début de la chute qui ne se déclarera cliniquement qu’en septembre 2007…
le 22 mars 2002, mariage du Roi: une première!
Le 16 mai 2003, les attentats de Casablanca qui tirent la sonnette d’alarme, sont suivis par la marche du 25 mai, sans produire le réveil nécessaire.
Durant cette période, le Roi prend, entre autres, deux initiatives importantes répondant à des besoins réels. Le 9 janvier 2002, la lettre au gouvernement sur l’encouragement de l’investissement et la création des CRI. Et le 18 mai 2005, le discours sur l’INDH. Investissement et développement humain, exactement les deux chantiers majeurs du développement et de la stabilité du pays. Malheureusement, les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes. La démarche up down ne marche pas. Et surtout, dans les deux cas, l’exécution étant confiée aux autorités locales, la confiance n’a pas été au rendez-vous.
Conclusion provisoire: le Roi continue à être au centre du jeu politique et des initiatives majeures. Les partis politiques n’ont tiré aucun bénéfice pour consolider leur implantation et accompagner l’évolution de la société. Bien au contraire!
Pourtant, l’alternance consensuelle imaginée par Feu Hassan II et les partis de la Koutla était justement destinée à déplacer le curseur du pouvoir.