Vous ne connaissez pas ?
C’est le maire tout puissant de Fès, capitale spirituelle du Maroc, ville impériale douze fois séculaire, berceau de la culture et du raffinement, ville d’origine du nationalisme marocain, de la diplomatie, du savoir vivre, du commerce international, du caftan, des babouches, de la gastronomie, de la modernité et de la tradition, de la musique et de la poésie, du soufisme et de la joie de vivre…
Hamid Chabat est en réalité devenu le patron de Fès, après Moulay Driss. Il est le député de cette ville depuis plusieurs mandats.
Les élections c’est son truc. Il se fait élire comme une lettre à la poste, il est en campagne électorale chaque jour, il chasse les voix de chaque instant.
Il est généreux avec les nécessiteux et ne refuse rien aux riches.
L’intelligentsia, évoquant principes et valeurs, se fâche avec lui ? Il s’en moque éperdument. Ses membres trop peu nombreux, et si hautains, ne votent même pas. Alors qu’ils parlent, qu’ils écrivent dans la presse, qu’ils continuent à discuter dans les salons : il ne s’en préoccupe pas.
Tous les signaux qui lui viennent d’en haut le réconfortent. Il est l’homme de la situation. Il rend un service inestimable au système sécuritaire. Ses méthodes sont plus efficaces que celles des intégristes. Son audace dépasse celle des fanatiques. Son réseau est plus dense que celui des islamistes. Son populisme a fait ses preuves.
Il y a deux ans et demi, Chabat avait réussi à gratter les tentacules de Afilal, leader emblématique, manœuvrier et jusque là indéboulonnable de l’UGTM, syndicat du parti de l’Istiqlal. Il l’avait mis à la porte et fait « élire » un certain Andaloussi à sa place.
Il y a quelques jours, Chabat a remis ça. A l’approche de l’Aid El Adha, il a sacrifié son allié Andaloussi pour amplifier sa main basse sur le syndicat.
Jusqu’où ira Hamid Chabat ? C’est la question que tout Fès se pose, avec admiration chez les uns, nombreux, et avec angoisse chez tous ceux qui ne comptent plus dans le processus démocratique transparent.
Mais chacun sait que Chabat ne s’arrêtera pas là. Ce n’est pas seulement le syndicat qui l’intéresse. Ce n’est pas les intérêts de la ville de Fès qui le motivent.
Chabat veut aller plus loin.
Conquérir le parti ? Non, ce n’est pas son trip. Il préfère être faiseur de dirigeants. Cela lui réussit parfaitement. Lui il n’a pas besoin du parti. C’est plutôt le parti qui s’accroche à lui, qui ne peut plus rien lui refuser.
Mais d’où vient Hamid Chabat ? Natif de Taza (sa biographie officielle ne dit pas en quelle année !!!), il ne fait presque pas d’études. Ouvrier dans une usine démantelée, il se distingue dans l’agitation syndicale. De fil en aiguille, il est arrivé au sommet de Fès. Il commence à en avoir le tournis. Il finance un journal local qui organise le culte de sa personnalité, en commençant par lui attribuer de la poésie et lui inventer une ascendance généalogique prestigieuse.
Chabatescu, le Génie du Sébou est né !
Nous en reparlerons certainement à l’occasion du prochain congrès du parti de l’Istiqlal qui aura à trancher la reconduction de Abbès El Fassi, premier ministre, à la tête du parti.