Pour ma promenade dominicale, je décide de sortir des sentiers battus, dans le vrai sens du terme. Sur une colline, un chemin de bergers me conduit à la rencontre de Reda. Il accepte de discuter avec moi.
Il a douze ans. Il va à l’école pas loin de son douar. Il est en classe finale du primaire. Il a doublé une année. Il n’est pas bon élève. Il n’y en a pas avec lui, il tient à le préciser. Il ne parle pas un mot en français, il n’est pas bon en arabe. Chez lui et dans le douar il ne parle que amazigh.
Que fait-il quand il n’est pas à l’école ? Il s’occupe du troupeau de la famille. Vingt têtes, nous les comptons ensemble. Huit chèvres et douze moutons. Les dernières pluies nourrissent le sol, les arbres et le troupeau.
Aujourd’hui, jour anniversaire des Accords de Paris sur le climat, le petit troupeau de Reda n’en attend rien du tout. Demain, jour de déclaration du Couscous comme patrimoine mondial de l’Unesco, Reda n’en a cure. Cette semaine a aussi vu l’établissement de relations avec Israël. Peut-être cela pourrait nous inspirer pour résoudre la question linguistique en suivant l’approche qui a permis à Israël de réformer l’hébreu et de le rendre langue officielle utilisée dans tous les domaines par tous les habitants, malgré les différences de leurs provenances. Reda ne sait pas quoi dire.
J’ose la question qui me brûle les lèvres, qui me turlupine la tête. Son rêve ? Un sourire s’affiche sur son beau visage, la réponse fuse : Je n’en ai pas !
Si Reda n’a pas de rêve, si les millions d’enfants marocains sont comme lui, dans quel Maroc vivront les marocains de demain ?
Qui est responsable des rêves des enfants ? Sa famille ? Les maîtres de son école ? Les pouvoirs publics ? La société ? La mondialisation ? Le colonialisme ?
Qui est coupable de la suppression des rêves des têtes des enfants ?